36 jeunes filles victimes de viol à Keur Gol, la vie d’après.

36 jeunes filles victimes de viol à Keur Gol, la vie d’après.

36 jeunes filles auraient été violées par Sergine Khadim Mbacké, maître coranique, des pensionnaires de son daara(Ecole coranique). Actuellement dans les liens de la détention, en cavale après l’éclatement de cette affaire, le mis en cause a été arrêté suite à son retour à Touba. Auditionné au cours de sa garde à vue, il avait nié les faits qui lui sont reprochés. Pour se défendre, Serigne Khadim Mbacké avait déclaré un complot ourdi pour le faire tomber. Quelques temps après les faits, nous sommespartis à la rencontre des victimes, des familles des victimes. Il s’agissait entre autres de donner la parole aux victimeset de voir comment est-ce que les victimes se sentaient. Les victimes déclarées sont au nombre de 36 et sont âgées entre 6 et 15 ans.

Un samedi matin on arrive à Keur Gol, un lieu tristement célèbre pour l’affaire des 36 filles violées par leur maitre coranique. La localité est située à sept Kilomètre de Touba, difficile d’accès et enclavé. Au domicile du chef de quartier, les victimes sont installées sur des nattes entourées de leurs mamans et du chef de quartier, plus frêles les unes que les autres. Toutes voilées, elles utilisent leurs foulards pour cacher leurs visages. Têtes baissées elles sont âgées entre 6 et 15 ans et ont subi pendant presque trois ans des viols à répétitions venant de leur maitre coranique, accueilli dans le quartier depuis 2018.  Les unes souffrant de troubles psychologiques, d’autres d’infections, les témoignages sont écœurant.

« Je ne parviens toujours pas à dormir du sommeil du juste, depuis lors je ressens des douleurs, courbatures accompagnées de cauchemars ». C’est en ces mots à peine audible que Soda G répond à notre question comment vas-tu ? 

Elle est la plus âgée des victimes des viols à répétition, elle a quinze ans. Vêtu d’un complet Wax rose, le voile sur la tête couvrant ses yeux, le regard baissé, elle se tortille les doigts, c’est une adolescente en souffrance qui a répondu à nos questions. Elle se dévoile malgré les nombreuses peines qui couvrent son visage. Elle a pu dompter sa douleur le temps d’un entretien, elle revient sur sa mésaventure, qui a scellé son avenir d’enfant. Des mots de peines enfuient dans les tréfonds de son être se succèdent peu à peu, difficile d’articuler correctement, un coup pousse est souvent nécessaire pour pouvoir retracer le film de ses maux :  

« Je n’étais pas pensionnaire de son école contrairement à ma petite sœur Ndeye F. Pour la première fois, j’y suis aller pour accompagner ma petite sœur à la demande de ma mère qui vit avec un handicap. A notre arrivée, Serigne Khadim m’a sommé de venir jusque dans sa chambre, eh… c’est là il a commencé ses tentations. J’ai manifesté mon refus, puis il insistait et j’ai voulu crier, c’est à partir de là qu’il a renoncé. Il m’a menacé en ces termes ‘’si jamais tu racontes ce qui s’est passé à quelqu’un, je vais te tuer’’.

A la deuxième tentative, il réussira son plan machiavélique, le regard hagard, les mains tremblantes, difficile pour elle de poursuivre la conversation. Si jeune, elle voit son envol amorti par un coup dur qu’elle a reçu de plein fouet. Une lutte hybride qu’elle doit mener à la fois, celle de briser le silence, et celle de surmonter ses douleurs. Dans la foulée, elle retrouve de là, sa force petit à petit, et poursuit :

« Je me suis rendu chez lui pour la deuxième fois afin qu’il puisse plastifier quelques pages du livre de ma petite sœursous la recommandation de ma maman ; aussitôt arrivée il m’a forcé à boire une eau contenue dans un seau, c’est lorsque j’ai bu à cette eau que j’ai commencée à perdre connaissance mais pas totalement, il a en profité à ce moment pour abuser de moi, je sentais ses coups de reins et les douleurs également, je pleurais… ».

A la suite de cet acte ignoble, l’adolescente se plaignant de maux de ventre et de vertiges, est acheminée à lhôpital pour des soins mais elle gardera ce secret au profond d’elle-même et ne s’en ouvrira qu’à son amie qui a également avoué être victime de Serigne Khadim. Ainsi débuta son calvaire, le sieur Khadim l’a violée dès qu’il en avait l’occasion.

Pour mettre un terme à son calvaire et réparer le préjudice énorme qu’elle a subi, la jeune fille s’exprime en ces termes « Je veux qu’on le tue une bonne fois. »

Cette fille comme les 35 victimes traine des infections et deux d’entre elles à notre dernière visite ont présentés des troubles psychiques, des ordonnances à l’appui. Un viol de trop qui vient de voler à ces filles toute leur innocence avec des parents désespérés mais qui ont tenu à rendre public les agissements du maitre coranique.  

La voix tremblante d’émotions, des temps d’arrêts momentanés qui traduisent la lourdeur d’un sac de douleur à vider. Difficile de commencer l’interview, elle essuya ses larmes et soupira, Binta T, la maman de deux victimes se livre. « C’est vraiment écœurant cette situation, c’est comme si j’étais la maman de toutes les filles victimes. L’affaire m’a tellement surpris, je suis meurtrie et cela me ronge le cœur depuis lors… »

Difficile pour elle d’aller au fond de l’entretien, la voix tremblante, les yeux larmoyants, les ordonnances des filles à la main, elle s’efforce quand-même pour poursuivre son témoignage :

« L’affaire a éclaté grâce à ma fille qui s’est confiée à sa grande sœur. Elle a beau avaler ses mots mais elle savait que la dénonciation pouvait être la solution parfaite. Il faut rappeler que lorsqu’elle a racontée l’histoire à ma fille ainée, cette dernière n’y croyait pas du tout. Elle a même failli la tabasser croyant qu’elle racontait des contrevérités. Par la suite mon ainée est allée jusqu’à faire venir 4 jeune filles pensionnaires de l’école de serigne khadim qui sont destémoins afin de corroborer ses propos. Ces 4 filles ont tout simplement abondé dans le même sens en confirmant les actes sordides de serigne khadim envers elles et tant d’autres filles ».

Face à la gravité des accusations, la mère de famille a pris son courage à deux mains et a décidé d’en parler à tout le monde afin qu’il ait des sanctions. Un avenir incertain pour ces filles qui sont déjà victimes de stigmatisation. Ces mamans craignent également pour leur avenir : « A vrai dire, cela m’inquiète énormément, j’ai même des difficultés pour dormir correctement la nuit à cause de tout ce qui s’est passé. Le fait d’imaginer des petits enfants subir d’actes à cet âge me laisse perplexe. Cela peut causer un début de perversion chez elles ou de débauche, à cause de ces actes sordides qu’elles ont eu à subir ».

Face à une telle ignominie, Adama POUYE, chef de quartier et aussi père adoptif d’une jeune fille victime, âgée seulement de 10 ans et 6 mois a témoigné afin de lever les équivoques liées à l’affaire. « A cette période, une fois qu’elles arrivent à leurs maisons respectives, elles se plaignent souvent de douleurs : Maux de têtes, maux de ventres etc. Nous disions d’habitude qu’elles voulaient faire l’école buissonnière, tellement que nous avions une confiance aveugle en SerigneKhadim. C’est par la suite qu’on a fait la corrélation entre les douleurs dont se plaignaient nos enfants avec l’affaire ». Le chef de quartier de poursuivre :

« A l’éclatement de l’affaire nous avons fait les démarches nécessaires pour saisir la justice. La première plainte a pris du temps pour aboutir cest par la suite qu’on déposer une plainte collective ce qui a favorisé l’arrestation du mis en cause. »

Par ailleurs, Adama POUYE dit être disposer à aller jusqu’au bout de cette affaire jusquà ce que justice soit rendue. Cest le moment aussi pour le chef de quartier de magnifier le travail de Amnesty International, de lAssociation des Juristes Sénégalaises, la visite du ministère de la femme mais aussi les bonnes volontés qui n’ont ménagé aucun effort pour la prise en charge de ces filles. Ce jour même des interviews, Jaly Badiane une activiste engagée s’est rendue sur les lieux du drame pour apporter soutient et assistance. Dans un élan de solidarité, avec de bonnes volontés, ces enfants bénéficient aujourd’hui d’un appui juridique, psychologique et sanitaire mais aussi financier pour la prise en charge des ordonnances et des frais de transport pour les auditions mais également pour les rendez-vous médicaux selon la jeune activiste.

A l’image de Binta T, les mamans des victimes attendent une application de la loi dans toute sa rigueur. La liste des témoignages est loin de connaitre son épilogue, si d’aucuns peinent à se confier ou retracer l’histoire vécue par leurs filles, d’autres portent leur courage en bandoulière malgré la tristesse et le désespoir qui se lisent sur leurs visages et d’apporter le soutien nécessaire à la reconstruction sociale et psychologique de leurs filles après ce drame.

Selon les parents des victimes, les témoignages recueillis auprès de leurs enfants ont permis de découvrir que le sieur Khadim a commencé ces horreurs lors de la pandémie de covid 19. Donc pendant 3 ans, ces enfants ont fait face à leur bourreau et ont eu à subir des viols à répétitions.

En attenant une suite judiciaire de cette affaire, les victimes et familles de victimes traversent des moments difficiles, partagées entre la reconstruction de leurs filles et l’application de loi dans toute sa rigueur.

 

Alice DJIBA et Mohamed NDIAYE

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